Un mulot dans mon potager
Mon potager retrouve tout doucement figure... potagère. J'ai enlevé les salades montées, j'ai récolté les graines de petits pois et de fèves, et j'ai commencé de nouveaux semis pour l'arrière-saison.
En particulier, j'ai semé des bettes "à feuilles". Ce sont des bettes qui ne font pas de cardes mais uniquement des feuilles. Elles se cuisinent comme des épinards, j'aime beaucoup.
En creusant mes sillons, j'avais bien remarqué quelques galeries... sans trop m'y attarder.
Cela n'avait pas d'importance pour moi mais, manifestement, il n'en allait pas autant pour le propriétaire des lieux. J'ai nommé "Le mulot".
Le mulot est manifestement un animal opiniâtre et courageux. Pas de lamentations, pas de jérémiades. Une fois le désastre constaté, il s'est immédiatement mis au travail. Objectif : retrouver l'entrée de sa galerie.
Je l'ai observé bien longtemps. En plein soleil, alors qu'il est plutôt nocturne, il s'est mis à creuser avec l'énergie du désespoir, à la recherche de sa galerie perdue et, peut-être, de sa nichée enterrée.
J'ai pu apprécier sa stratégie : creuser en arc de cercle en déposant les morceaux de terre compacte sur les côtés. Tout absorbé par son objectif, il ne m'a même pas remarquée.
Je sais, un mulot dans le potager, ce n'est pas une bonne idée : grand consommateur de graines, il creuse ses galeries là où il ne faudrait pas et grignote à l'occasion l'un ou l'autre légume. Mais celui-là, il a gagné le droit de rester, tant pis pour les bettes à feuilles
Il a finalement retrouvé sa galerie. Il était temps, je commençais à culpabiliser.
Je sais, j'en parle à mon aise. C'est vraiment un luxe de laisser vivre un mulot dans son potager. Je n'ai pas à me soucier de considérations économiques, je ne crains pas la famine. Si les légumes viennent à manquer, je pourrai toujours en acheter.
Tout cela pose, évidemment, la question des relations entre espèces. Est-ce qu'en tant qu'être humain, j'ai le droit de détruire un animal aussi vaillant, courageux et, il faut bien l'avouer, mignon ? N'est-ce pas absurde de dépenser des fortunes en vétérinaire pour un lapin ou une chèvre apprivoisés et de supprimer un brave petit mulot pour protéger quelques légumes ?
J'y ai répondu aujourd'hui, provisoirement et sans grande réflexion. Mais il n'est pas dit que je ne reverrai pas ma position s'il lui prenait l'idée d'exagérer.
Mon chat parfum, lui, ne se pose pas ce genre de question.