Un semis réussi de Lippia dulcis : la plante sucrante qui a bon goût

Publié le par Annick Boidron

Le rayon des plantes "sucrantes" est de plus en plus fourni. La plus connue d'entre elles est la stévia : je ne l'aime pas ! Je lui trouve un petit arrière-goût amer assez déplaisant. Ma préférence va à une petite plante rampante facile de culture, quoique gélive : Lippia dulcis. Également connue sous une kyrielle de noms plus séduisants (et vendeurs), tels que "verveine sucrante" ou "plante à sucre des Aztèques".

Un semis réussi de Lippia dulcis : la plante sucrante qui a bon goût

Je ne pense pas qu'on en extraie du "sucre" en vente dans les magasins comme ça se fait pour la stévia. En revanche, il suffit de s'en procurer une petite plante pour pouvoir se concocter des tisanes très aromatiques (et sucrées) ou pour parfumer ses salades de fruits pendant tout l'été. Certains parlent de goût "camphré" (la plante contient effectivement du camphre), d'autres lui trouvent une saveur mentholée. Et pour moi, elle a un très net parfum de réglisse.

Tout est consommable, des racines aux fleurs. Ce sont les petites inflorescences en boutons que je préfère : j'adore en grignoter une ou deux quand je vais dans la serre.

Tout est consommable, des racines aux fleurs. Ce sont les petites inflorescences en boutons que je préfère : j'adore en grignoter une ou deux quand je vais dans la serre.

C'est mon ami Hugues du jardin du Bouillon Blanc qui me l'a fait découvrir. Depuis, je m'en procure une petite plante chaque année. Je la cultive en pot dans la serre. Il s'agit d'une plante vivace mais elle meurt dès qu'on atteint les -2 ou -3°C. Je n'ai jamais pensé à la rentrer à temps. Résultat : elle meurt en hiver.

Mon lippia en octobre. Ce que j'aurais dû faire alors : récolter les branches et les faire sécher, rentrer la plante. Quelques jours plus tard il gelait : c'était foutu !

Mon lippia en octobre. Ce que j'aurais dû faire alors : récolter les branches et les faire sécher, rentrer la plante. Quelques jours plus tard il gelait : c'était foutu !

Je n'ai toujours pas appris de mes erreurs et cette année encore, mon lippia a gelé. Mais cette fois-ci, j'ai eu la présence d'esprit de récolter des graines "post mortem".

Les inflorescences s'allongent pendant tout l'été et finissent par sécher et brunir. Elles contiennent les graines.
Les inflorescences s'allongent pendant tout l'été et finissent par sécher et brunir. Elles contiennent les graines.

Les inflorescences s'allongent pendant tout l'été et finissent par sécher et brunir. Elles contiennent les graines.

Même à l'aide d'une loupe, j'ai été bien incapable de distinguer les graines des débris d'inflorescences desséchés.  Je n'étais même pas certaine qu'il y en avait. Aussi, j'ai tout semé "en vrac" :

Semis de Lippia dulcis réalisés le 17 mars 2021

Semis de Lippia dulcis réalisés le 17 mars 2021

Cette fois, la méthode "petits cailloux" n'a pas marché. La levée n'a eu lieu que dans le pot de gauche : les graines n'étaient pas recouvertes. C'est étonnant car, en me renseignant sur le semis de Lippia avant d'écrire cet article (vous me direz qu'il était bien temps !), j'ai lu plusieurs fois que ces graines germaient à l'obscurité. Enfin soit, ça a marché, tant mieux ! J'ai conservé les semis à une température de 20° environ dans une boite comme celle-ci :

Un semis réussi de Lippia dulcis : la plante sucrante qui a bon goût

Il aura fallu presque quatre semaines, avant que je voie apparaître les premiers (minuscules) signes de germination.

J'avais bien dit : "minuscules". (Photo du 7 avril 2021)

J'avais bien dit : "minuscules". (Photo du 7 avril 2021)

Et aujourd'hui, deux mois après le semis, les petits plants ont atteint une taille suffisante pour que je puisse les repiquer :

Un semis réussi de Lippia dulcis : la plante sucrante qui a bon goût
Joli petit plant, non ?

Joli petit plant, non ?

Repiquage tout en délicatesse : la plante est maintenue en place pendant que le pot est rempli progressivement de terreau. Ensuite il suffit de secouer un peu le pot pour ne pas laisser de vides : c'est en arrosant que la terre va adhérer aux racines et permettre la reprise.

Et une petite couche de graviers pour terminer !
Et une petite couche de graviers pour terminer !
Et une petite couche de graviers pour terminer !

Et une petite couche de graviers pour terminer !

Les plus gros ont eu droit à un godet individuel mais, vous me connaissez, je n'ai pas eu le cœur de jeter les petits... et il me restait de la place dans un plateau de Silène Gallica (Issues du SOL, merci Sofie).

Si tout cela pousse, je ferai une belle récolte ! de toutes façons, je connais des amateurs avec qui partager !

Si tout cela pousse, je ferai une belle récolte ! de toutes façons, je connais des amateurs avec qui partager !

Ces jeunes plants vont encore rester dans la maison un jour ou deux car on annonce des températures proches de zéro ! La semaine prochaine, je pense que je vais pouvoir les transférer dans la serre.

Encore deux ou trois petites choses bonnes à savoir

  • Hernandulcine est le nom de la molécule "sucrante", présente dans Lippia dulcis. Son pouvoir sucrant serait 1000 fois supérieur à celui du saccharose (le "bête" sucre). Selon d'autres sources, ce serait "seulement" 100 fois. On ne va pas chipoter pour un facteur 10. Cela dit, sa saveur m'intéresse plus que son pouvoir sucrant (très perceptible, cependant).
  • Comme je l'ai dit plus haut, Lippia dulcis contient du camphre et le camphre, tenez-vous bien, "est toxique à haute dose". A quoi correspond une "haute dose" ? Une branche de lippia ? Tout un plant de lippia ?  un champ de lippias? " On dirait bien que je suis la seule personne au monde à m'être posé la question car on retrouve partout cette histoire de "haute dose" un peu partout sans que cela suscite la moindre interrogation.
  • Enfin, s'il est assez compliqué de se procurer des graines, on peut sans problème trouver un plant... et récolter ses graines à l'automne. On aura ainsi le temps d'apprécier sa saveur (ou pas) et de savoir si ça vaut la peine de passer son temps à la semer : tout le monde n'aime pas !

Un dernier petit truc avant de se quitter

  • Lippia dulcis a été "sortie" du genre "Lippia" pour entrer dans le genre "Phyla" ... son "vrai" nom serait donc Phyla dulcis... Pour simplifier les choses, on la trouve aussi sous les noms de  Phyla scaberrima ou même Phylum scaberrimum. Je garde Lippia dulcis (qui reste un synonyme accepté), c'est tout de même plus agréable à prononcer.

Nous sommes le 7 mai et je suis seulement en train de "vider la serre" : rempotages et repiquages au programme, car j'espère pouvoir (enfin) y installer mes tomates et poivrons qui prennent des proportions gigantesques... mais comme il gèle encore certaines nuits, je préfère attendre encore un peu. Je vous raconterai tout ça... dès que j'aurai un peu de temps. A bientôt.

Sources

Compadre, Cesar & Robbins, Eugene & Kinghorn, A.Douglas. (1986). The intensely sweet herb, Lippia dulcis Trev.: Historical uses, field inquiries, and constituents. Journal of ethnopharmacology. 15. 89-106. 10.1016/0378-8741(86)90105-4.

Schoch CL, et al. NCBI Taxonomy: a comprehensive update on curation, resources and tools. Database (Oxford). 2020: baaa062. [Full text] [PubMed]

Chiltren Seeds, site de vente de graines en ligne, article consacré à Lippia Dulcis (En anglais). URL : https://www.chilternseeds.co.uk/item_816c_mayan_mint_lippia_dulcis_seeds

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C
Bonjour ! À la recherche d infos sur une nouvelle venue dans mon potager je suis tombée sur votre site ! J ai lu plusieurs articles très intéressants.... Et je suis tombée sur celui-ci ! J ai aussi semé de la Lippia l année passée et à l automne j ai suivi le conseil de Madame Cécile Troux de la pépinière Sebtan qui préconise de faire des boutures dans l eau juste avant les premières gelées afin de pouvoir hiverner cette frileuse en pot à l interieur de la maison....ce que j ai fait et je dois dire que c est bien plus facile que le semis et les plans sont bien plus grands à présent que mes minus de l an passé. Première année de pratique donc peu de recul .Peut être que cette info pourra vous intéresser. Salutations et félicitations ( pour votre site passionnant ) une collègue "Perma" jardinière Suisse.
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A
Bonjour et merci pour l'astuce ! C'est vraiment une bonne idée, qui semble tomber sous le sens, mais je n'y ai jamais pensé. Ce sera pour cet automne. Bonne continuation au jardin.
A
j'ai suivi votre conseil pour mon semis de mesclun qui stagnait .Comme je n'avais plus de purin d'ortie , j'ai mis un peu d'urine diluée . Super , qq jours après ma petite forêt s'est un peu élevée ,pourvu que ça dure En tout cas merci du conseil Anne
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N
Très intéressant, j'ai lu l'article sans m'en rendre compte. Merci !
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L
Je decouvre votre blog...Que dire... Passionnant ! Merci et bravo !Je vais poursuivre mon exploration et ma lecture.
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R
Très intéressant, comme toujours. Même si celle ne viendra jamais chez moi. La réglisse est l'un des parfum que je n'aime vraiment pas du tout (avec l'anis). Mais j'aime beaucoup ton idée de test avec et sans gravier. Toujours utile de tenter un semis de plusieurs manières et c'est pas moi qui dira le contraire. <br /> Bises
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M
Intéressant. Je ne connaissais pas cette plante. Je l'ajoute sur ma liste.
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A
Marijke, je t'en apporterai un petit pot !
C
C'est toujours avec beaucoup d'intérêt que j'ai lu votre article bien documenté à propos de "lippia dulcis". Merci et beau week-end. A ajouter sur "la liste de mes envies".
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G
Je trouve que le petit plant ressemble à mon agastache qui a aussi un goût de réglisse, pourtant la plante plus grande a l'air bien différente. Toujours intéressant de découvrir de nouvelles aromatiques.
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A
C'est vrai que le goût de Lippia ferait penser à celui de certaines agastaches, mais il est beaucoup plus puissant mais effectivement la plante est très différente : plus "ligneuse" et ramifiée, elle fait penser à un petit arbuste.
B
"Essai transformé" : encore une belle réussite tous ces petits plants ! Hé oui, comment expliquer aux tomates et aux poivrons que nous sommes en Belgique et qu'il faut attendre que les Saints de Glace soient passés avant d'avoir la permission de sortie ?!
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A
les pauvres ! D'habitude, je peux tout de même les sortir dans la serre vers le 15 avril, quitte à les rentrer si on annonce des gelées. mais comme cette année on annonce gelée sur gelée, elles restent au chaud. Enfin, on dirait que ça va aller mieux : je suis en train de leur faire de la place.
F
Bonjour Annick,<br /> Un grand merci pour vos articles documentés et commentés avec beaucoup de simplicité et de franchise. J'ai eu le plaisir de découvrir votre jardin dans l'émission de TV dont vous nous aviez donné le lien et je dois dire que j'ai encore plus envie de venir le visiter. <br /> Est-ce que vous prévoyez déjà des dates de visite cet été? et pourriez-vous me dire dans quel coin est situé votre jardin et ce qu'il y a à voir dans les environs ( autre jardin, patrimoine, paysage...) afin que j'organise ma "virée" en Belgique? Merci par avance.<br /> Très cordialement,<br /> Francine<br /> francine.semmel@gmail.com
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A
Comme ça peut sans doute intéresser tout le monde, voici quelques informations : le jardin situé à côté de Bouillon, une petite ville de la vallée de la Semois pas loin de la frontière française. Si vous voulez cliquer sur le lien "carte d'identité du jardin" tout en haut de la page, il y a quelques photos. Le jardin est "ouvert" pour tous ceux qui désirent le visiter (juste un coup de fil au 00 32 61 467856 pour qu'il y ait quelqu'un !) mais nous organisons, avec d'autres jardiniers de la région, un circuit "jardins sans pesticides" le dimanche 27 juin. Il s'agit d'une dizaine de jardins répartis le long d'un itinéraire que chacun peut parcourir à sa guise. Le jardin des quatre moineaux fait partie de ce circuit. Le plus intéressant, c'est que pendant ce même week-end des 26 et 27(2jours), un très très beau jardin (de professionnel) organise sa journée "portes ouvertes". C'est le jardin "du Bouillon blanc", j'en ai déjà parlé (https://www.quatremoineaux.be/2019/06/le-jardin-de-la-halle-du-bouillon-blanc.html). <br /> <br /> Dans la région, outre de très belles randonnées, des descentes en kayak, il y a un château médiéval assez spectaculaire (mais dont la visite n'est, hélas, pas très passionnante). A une trentaine de kilomètres se trouve l'abbaye d'Orval dont la visite est très intéressante. SI vous envisagez une "virée" de plusieurs jours en Belgique, les villes de Liège, Bruxelles, Bruges (beaucoup de monde) etc, ont un patrimoine historique très riche et de très beaux musées. N'hésitez pas à me demander plus de renseignements, je me ferai un plaisir de vous répondre par mail.