Le légume du dimanche : l'hélianthi
Quand j'étais petite, on me disait souvent, allez savoir pourquoi, que lorsqu'une fille n'était pas jolie, elle avait tout de même une chance de trouver un mari... si elle était gentille. C'était une autre époque, enfin j'espère. L'hélianthi ressemble à cette fille-là : il n'est pas super-sexy... mais il a tant de qualités qu'il pourrait séduire le plus difficile des jardiniers.
Le nom latin de l'hélianthi, Helianthus strumosus, n'est vraiment glamour non plus. Notez que son cousin et rival, bien plus célèbre que lui, n'est pas mieux loti de ce côté-là : "Helianthus tuberosus". C'est le fameux topinambour, archétype du "légume oublié-retrouvé".
Cependant, quand on prend la peine de faire sa connaissance, l'hélianthi est bien plus intéressant que le topinambour : il se pèle facilement et son goût est plus délicat. Et ça, ce n'est pas rien.
Sur la première photo : un topinambour*, sur la seconde : un hélianthi. Lequel préférez-vous éplucher ?
Voici comment on le cuisine :
Quand les hélianthis sont pelés (facilement !) il vaut mieux les plonger dans de l'eau citronnée pour qu'ils ne noircissent pas
La cuisson est rapide : une dizaine de minutes à tout casser. Vous aurez remarqué les feuilles de sauge (salvia officinalis). C'est une recette de bonne femme pour faciliter la digestion car l'hélianthi contient de l'inuline.
L'inuline est un sucre que nous, pauvres humains, sommes incapables de digérer. En revanche, les bactéries qui vivent dans notre intestin y arrivent très bien... ce qui ne va pas sans émanations gazeuses, également appelées "flatulences". Mais en ajoutant de la sauge à l'eau de cuisson, on évite ce désagrément. Ne me demandez pas comment ça marche mais, d'expérience, ça marche ! ( C'est peut-être un effet psychologique...).
Une fois que les hélianthis sont cuits, on peut les faire revenir un peu à la poele avec, par exemple, une échalote et quelques petits morceaux de confit de canard comme ici.
Vous me direz ce que vous en pensez. Moi, je trouve l'hélianthi plus ferme et plus délicat que le topinambour. C'est, bien-sûr, une question de goût.
Pour cultiver l'hélianthi, il y a deux façons de faire :
Au début du printemps, on plante les tubercules espacés d'une vingtaine de centimètres dans une terre bien riche. L'hiver suivant, on récoltera de beaux gros fuseaux bien formés et bien charnus.
Il y a tout de même une chose que je ne vous ai pas dite : l'hélianthi, tout comme le topinambour, a la capacité de renaître de ses cendres... enfin, de ses miettes. Le moindre petit morceau oublié dans la terre donnera immanquablement naissance à un nouveau plant.
Cette année, par exemple, je n'ai rien planté du tout et pourtant, une grosse touffe d'hélianthis pousse dans ma "nouvelle bande potagère". Pas si nouvelle que ça, au fait, puisque je me suis contentée de réunir trois carrés existants.
A droite, une touffe d'hélianthis qui ont poussé à partir des miettes de la plantation "soignée" de 2019.
Cette zone, devenue "laisser-faire", bénéficie de l'ombre d'une haie de feuillus assez haute qui pousse du côté Sud. Cette préférence pour les lieux ombragés est bien intéressante : les légumes qui poussent bien dans ces conditions ne sont pas si nombreux.
Depuis novembre, pratiquement sans rien faire, je récolte des tubercules en quantité largement suffisante pour deux personnes sur une surface d'environ un mètre carré. A la différence de la méthode "soignée" ceux-ci sont plus petits et de tailles variées, mais en poids, il y en a tout autant.
Récolte d'hélianthis cultivés par la méthode "laisser-faire" : les plus gros mesurent environ douze centimètres de long.
Je vais en récolter au moins jusqu'au début du mois de mars, date à laquelle la végétation reprend. C'est un autre avantage des hélianthis (et des topinambours) : ils se conservent dans le sol pendant tout l'hiver et nous les récoltons au fur-et-à-mesure de nos besoins.
L'hélianthi a tout de même quelques caractéristiques particulières que certains pourraient qualifier de défauts mais qui me semblent cependant bien anodins.
- Ils sont TRÈS vigoureux et s'étendent rapidement. Tant mieux, on en récolte d'autant plus. Il est toutefois plus prudent de les tenir à l’œil et d'arracher les petites pousses qui auraient envie de s'échapper de la zone qui leur est dévolue. Quand elles mesurent seulement quelques centimètres de haut, ça se fait sans effort.
- Si on les laisse faire, les hélianthis atteignent une taille de plus de deux mètres de haut, parfois jusqu'à trois mètres. Les plants de la périphérie finissent souvent par s'affaler et c'est moche. Mais j'ai trouvé la parade : je coupe régulièrement la végétation à une cinquantaine de centimètres du sol. Ma récolte s'en trouve peut-être un peu réduite, mais j'obtiens ainsi des plantes touffues qui ne s'effondrent pas.
Allez, vous en plantez ? C'est le moment de se procurer des tubercules.
Si vous habitez dans la région, passez en chercher à la maison, vous pourrez les repiquer immédiatement. Sinon, on peut en trouver facilement en faisant une petite recherche du genre "acheter des tubercules d'hélianthis". A noter qu'il existe aussi des "topinambours fuseaux" qui ressemblent furieusement à notre Helianthus strumosus mais qui appartiennent à la même espèce que le topinambour "classique", Helianthus tuberosus. En même temps, il parait que les deux s'hybrident facilement... mais là, ça commence à se compliquer...
A bientôt.
* La photo du topinambour provient du site "locavor" : https://locavor.fr/produit/129263-topinambours. Moi, je n'en cultive plus.